LeXVIIe siĂšcle en France est par excellence le siĂšcle du théùtre. Ce genre en plus d’ĂȘtre une reprĂ©sentation comique, un Ă©vĂšnement artistique et littĂ©raire est un prolongement de ceux de la cour ou des salons ; c’est un vĂ©ritable rite social. Aucun genre ne dĂ©pend davantage de la rĂ©alitĂ© sociale contemporaine. Nous allons montrer comment la comĂ©die, en plus de divertir LaFrance est souvent trompĂ©e, mais comme une femme l’est, par des idĂ©es gĂ©nĂ©reuses, par des sentiments chaleureux dont la portĂ©e Ă©chappe d’abord au calcul. Ainsi dĂ©jĂ , pour premier trait caractĂ©ristique, le faubourg Saint-Germain a la splendeur de ses hĂŽtels, ses grands jardins, leur silence, jadis en harmonie avec la magnificence de ses fortunes territoriales. Cet espace NotreinvitĂ© Oumarou Baraya Ibrahim nous vient du Niger. IngĂ©nieur des Mines brillant, il est laurĂ©at de l’UniversitĂ© FĂ©dĂ©rale de Technologie d’AKURE au Nigeria, de l’école des Mines de Paris et de l’institut international des eaux et de l’environnement de Ouagadougou au Burkina Faso. AttachĂ© Ă  la transmission des savoirs Ă  la jeune gĂ©nĂ©ration africaine, Baraya a d Sila finalitĂ© de l’étude est de dĂ©crire l’évolution de tendances intĂ©ressant le couple et l’amour, l’ambition est aussi de mettre au jour leur background idĂ©ologique. Car il y a les pratiques sociales, il y a les valeurs (ou contre-valeurs) sur lesquelles s’appuient ces pratiques, et plus largement l’arriĂšre-plan idĂ©ologique, « l’air du temps » qui accompagne les Citationsdu thĂšme Amour; L'amertume emprisonne la vie; l'amour la libĂšre. Toujours dans Le Petit Larousse 2019, le biloute (terme d'affection) des ch'tis, le mĂ©ridional poutouner Vay Tiền Nhanh Ggads. Photo GaĂ«lle Vuillaume À la suite de la crĂ©ation de son blogue Mots d'Elles, Deborah Cherenfant a donnĂ© une sĂ©rie de confĂ©rences dans les cĂ©geps et diffĂ©rents organismes sur l'ambition au fĂ©minin. La Fondation Y des femmes a remis les prix Femmes de mĂ©rite la semaine derniĂšre. Parmi les laurĂ©ates, Deborah Cherenfant a remportĂ© le prix dans la catĂ©gorie Entrepreneuriat. Cette reconnaissance rĂ©compense celles qui se dĂ©marquent et dont les rĂ©alisations ont un impact dans notre sociĂ©tĂ©. D'HaĂŻti, Deborah Cherenfant est arrivĂ©e au QuĂ©bec en 2005 pour poursuivre ses Ă©tudes Ă  MontrĂ©al aux HEC MontrĂ©al. Je voulais avoir les compĂ©tences en gestion d'entreprise, avoir la crĂ©dibilitĂ© et le diplĂŽme pour pouvoir me lancer en affaires », explique la jeune femme. Elle n'a pas perdu de temps. En 2011, elle crĂ©e Mots d'Elles, un blogue qui fait dĂ©couvrir des femmes qui ont rĂ©ussi en affaires. Mots d'Elles traite aussi de leadership et d'ambition au fĂ©minin et brosse des portraits de femmes en entreprises. Ç'a toujours Ă©tĂ© important pour moi de m'inspirer de femmes du milieu des affaires, mais j'avais besoin de modĂšles de rĂ©ussite et je suis allĂ©e Ă  leur rencontre », explique-t-elle. Ses modĂšles ? GeneviĂšve Grandbois Chocolats GeneviĂšve Grandbois, DaniĂšle Henkel et Jocelyna Dubuc du Spa Eastman, des femmes qui ont d'ailleurs reçu le mĂȘme prix de la Fondation Y des femmes. Vous imaginez ce que ce prix reprĂ©sente pour moi ! », s'exclame-t-elle. Elle cite Ă©galement comme inspiration l'ex-ministre française de la Justice Christiane Taubira, qu'elle a eu la chance de rencontrer. De la couleur dans l'hiver quĂ©bĂ©cois À la suite de la crĂ©ation de son blogue, Deborah Cherenfant a donnĂ© une sĂ©rie de confĂ©rences dans les cĂ©geps et diffĂ©rents organismes sur l'ambition au fĂ©minin. On trouve toujours que les femmes manquent d'estime d'elles-mĂȘmes et qu'elles ont peur d'avoir de l'ambition. Il faut y remĂ©dier et c'est pour ça que je m'implique. » Pleine d'Ă©nergie, Deborah a lancĂ© en 2012 ColorĂ© design, une petite entreprise d'accessoires de mode et de design faits de tissus et d'imprimĂ©s originaux en vente au Je suis haĂŻtienne et passionnĂ©e de mode, j'aime ce mĂ©lange de tissus et de motifs traditionnels d'HaĂŻti, mais aussi d'Afrique et du Mexique, dit-elle. J'aime pouvoir faire revivre cette tradition, mais de maniĂšre plus moderne et surtout d'ajouter des couleurs vives dans notre hiver quĂ©bĂ©cois ! » Tous les accessoires sont produits localement avec des imprimĂ©s qui reprĂ©sentent d'autres cultures et j'aime cette dualitĂ© », confie la jeune entrepreneure qui cĂ©lĂ©brera ses 31 ans Ă  la fin du mois. ColorĂ© design emploie des femmes couturiĂšres immigrantes qui travaillent dans un atelier Ă  MontrĂ©al, dans le quartier Mile-Ex. Il est essentiel pour moi qu'une femme soit autonome financiĂšrement, et Ă©tant immigrante moi-mĂȘme, je suis sensible Ă  cette question, une question d'intĂ©gration. » MarchĂ© Ă©phĂ©mĂšre Deborah Cherenfant souhaite lancer un atelier en HaĂŻti d'ici la fin de l'annĂ©e avec des femmes qui sont atteintes du VIH. Ce n'est pas Ă©vident de trouver un emploi quand on vit avec le VIH, ce sont des femmes qui ont un diplĂŽme de couture et j'espĂšre que ce projet leur redonnera confiance et pourra les rĂ©insĂ©rer professionnellement », explique-t-elle. Comme elle multiplie les projets, la jeune femme d'affaires a aussi lancĂ© en dĂ©cembre dernier Le MarchĂ© ColorĂ© qui regroupe des crĂ©ateurs d'ici et d'ailleurs qui partagent la mĂȘme passion pour le textile et les motifs imprimĂ©s. Il s'agit d'un lieu oĂč on dĂ©couvre des piĂšces uniques faites par des artisans. Ce marchĂ© Ă©phĂ©mĂšre sera de retour au coeur du Quartier des spectacles Ă  l'Ă©tĂ©. La jeune femme prend aussi le temps de faire du bĂ©nĂ©volat et de s'impliquer socialement. Ainsi, elle prĂ©side le conseil d'administration de Compagnie F, un organisme communautaire qui vise l'autonomie financiĂšre des femmes. Elle a aussi participĂ© Ă  la construction d'habitations en RĂ©publique dominicaine au sein de l'organisme Habitat pour l'humanitĂ©. Ça me tient vraiment Ă  coeur et je souhaite, avec ce prix, m'impliquer encore plus dans des projets qui facilitent l'emploi des femmes et le leadership au fĂ©minin. » Photo fournie par ColorĂ© design Tunique aux imprimĂ©s colorĂ©s, de la collection ColorĂ© Design LĂ©loi portrait de lĂ©loi la grande ambition des femmes est d’ inspirer de l’ amour » MoliĂšre Je n ai rien trouvĂ© de mieux !Mais nous pouvons en dĂ©battre si vous le souhaitez lors de l’expo.. » .
LELOI Vous le rencontrez en direct, mardi 9 Aout, 17-19h aux Ateliers rue du Barry Cazals LOT Exposition tout le mois d’AoĂ»t 2022, ouvert tous les jours de 15 Ă  19h et sur rdv au 07 87 38 37 20 il est vivement conseillĂ© de tĂ©lĂ©phoner, merci Navigation de l’article Rencontres Gindou 202222 aoĂ»t Gourdon, 23 ThĂ©dirac, 24 Rampoux, 25 St Caprais, 26 Les vous avez un souci pour crĂ©er un article Lisez la rubrique Manuel d’Utilisation. Si vous avez toujours le problĂšme dĂ©crivez le avec prĂ©cision Ă  la rubrique Contact, on vous aidera Commentaires les plus rĂ©cents Articles rĂ©cents Les bons gestes pour lutter contre le moustique tigre Rencontres musicales de Gourdon Compagnie des Lieux et des Etres Connaissez-vous Valotri ? Un Ă©tĂ© prĂ©historique Ă  la Maison du Piage dernier atelier de l’étĂ© Poursuite des limitations aux usages de l’eau La grande ambition des femmes est d'inspirer de l'amour. Commentaires Aucun commentaire, soyez le premier Ă  commenter ! Ajouter un commentaire Connectez-vous pour commenter ou remplissez les champs ci-dessous Pseudo* E-mail* Site Web Merci de recopier le code ci-dessous* Être prĂ©venu par e-mail des nouveaux commentaires. * champs obligatoires La rĂ©alisatrice française Eva Husson avec son fils dans les bras, monte les marches du Festival de Cannes pour la projection de son film "Les Filles du Soleil", en compĂ©tition, le 12 mai 2018 VENANCE "Les scĂšnes de combat pendant 25 minutes, c'est chiant!", estimait la rĂ©alisatrice Ă  Cannes oĂč le film a Ă©tĂ© fraĂźchement accueilli au printemps. Ce que "je veux", c'est "ĂȘtre avec les personnages", insistait-elle. En salles mercredi, "Les filles du soleil" Ă©voque un sujet quasiment jamais traitĂ© Ă  l'Ă©cran, du moins en fiction le sort des femmes yĂ©zidies jamais identifiĂ©es comme telles dans le long mĂ©trage capturĂ©es par des jihadistes, transformĂ©es en esclaves sexuelles et devenues, pour certaines, des combattantes armĂ©es. Une histoire reposant sur des faits rĂ©els qui ont inspirĂ© cette cinĂ©aste revendiquant une approche fĂ©ministe, face Ă  une industrie du cinĂ©ma "dominĂ©e par un regard masculin blanc". Offre limitĂ©e. 2 mois pour 1€ sans engagement "Je pense trĂšs important que le monde se reprĂ©sente tel qu'il est... avec des femmes fortes qui ne soient pas que des victimes ou des prostituĂ©es", soulignait Eva Husson, qui s'est longuement entretenue avec des reporters de guerre et d'anciennes combattantes. En s'attaquant au film de guerre, aprĂšs un premier long mĂ©trage sur des jeunes organisant des orgies sexuelles "Bang gang", elle s'intĂ©resse uniquement aux personnages fĂ©minins et privilĂ©gie leur parcours plutĂŽt que les combats. Son film suit la sergente Bahar, incarnĂ©e par l'actrice d'origine iranienne Golshifteh Farahani trĂšs impliquĂ©e dans son rĂŽle au cours d'une offensive de quelques jours contre les islamistes quelque part au Kurdistan en novembre 2015. RĂ©flexion sur la maternitĂ©, le combat, la place des femmes, le tout surlignĂ© d'une musique trĂšs trop ? prĂ©sente, le film capte ses hĂ©roĂŻnes au plus prĂšs. - Film "de femme" ?- Au travers de flash-backs et de confessions auprĂšs d'une reporter, Mathilde Emmanuelle Bercot, le spectateur dĂ©couvre qu'avant de porter un treillis, Bahar Ă©tait avocate, mariĂ©e et mĂšre de famille. Sa vie a Ă©tĂ© transformĂ©e par l'arrivĂ©e soudaine d'"hommes en noir" qui ont tuĂ© son mari, kidnappĂ© son enfant et fait d'elle une esclave sexuelle. Une rĂ©alitĂ© traitĂ©e avec pudeur, la rĂ©alisatrice s'abstenant de montrer certaines atrocitĂ©s pour ne pas rĂ©duire les personnages au statut de "victimes". Elle prĂ©fĂšre construire une ode Ă  ces combattantes, filmant leur tĂ©nacitĂ©, comme celle de cette femme, Ă  deux doigts d'accoucher, fuyant les islamistes. DĂ©fendant un regard de femme "female gaze", oĂč l'attention est portĂ©e Ă  la reprĂ©sentation du corps fĂ©minin, aux violences faites aux femmes, au sexe et Ă  la nuditĂ©, Eva Husson estime qu'une telle scĂšne serait "beaucoup plus mise Ă  distance par des cinĂ©astes hommes". "Elle se revendique trĂšs fĂ©ministe. Moi je ne fais aucune diffĂ©rence. C'est plus son regard qui est singulier", estime Emmanuelle Bercot, Ă©galement rĂ©alisatrice "La tĂȘte haute". "Elle a envie de mettre les femmes en valeur Ă  sa maniĂšre, pas en les rendant belles mais avec des gros plans. Elle est comme une peintre avec nous". "Gageons que vous direz que c'est un film de femme", avait lancĂ© Thierry FrĂ©maux, le dĂ©lĂ©guĂ© gĂ©nĂ©ral de Cannes, en annonçant la sĂ©lection du film en compĂ©tition. Comme attendu, il a profondĂ©ment divisĂ© la Croisette. "D'un cĂŽtĂ©, elle braque les projecteurs sur une histoire terrible et importante ..., de l'autre, elle le fait de maniĂšre si poussive que cela nuit Ă  son message", Ă©crivait le Hollywood Reporter, quand le trĂšs influent site Indie Wire prĂ©disait rien de moins que la Palme d'or Ă  Eva Husson. "Tous les films que j'ai adorĂ©s sont clivants. Un film qui a un point de vue fort, c'est presque nĂ©cessaire qu'il soit clivant", rĂ©pliquait la rĂ©alisatrice. Les plus lus OpinionsLa chronique de Marion Van RenterghemPar Marion Van RenterghemLa chronique de Sylvain FortPar Sylvain FortLa chronique du Pr Gilles PialouxPar le Pr Gilles PialouxLa chronique de Pierre AssoulinePierre Assouline Six vies, Six noms Hokusai a changĂ© de style et de nom avec une aisance sans pareille, de ShunrĂŽ, SĂŽri, Hokusai, Taito, Iitsu Ă  celui de gakyĂŽ rĂŽjin manji. Le destin a accordĂ© Ă  ce gĂ©nie fou de dessin et de peinture » une trĂšs longue vie, employĂ©e Ă  la recherche du trait juste, dans une infinie diversitĂ© de styles et de supports. Il est sans doute malaisĂ© pour un esprit occidental de comprendre qu’à un seul individu peuvent s’attacher des dizaines de noms. On ne devrait pourtant pas s’en Ă©tonner dans un pays, le Japon, oĂč chaque changement de rĂšgne entraĂźne le choix d’une nouvelle appellation. Pourquoi celui d’un patronyme ne serait-il pas Ă©galement variable selon les circonstances, infiniment diverses, qui traversent toute une vie? C’est le cas de celui que la postĂ©ritĂ© a fini par dĂ©signer sous le nom de Hokusai 1760-1849 et dont on estime qu’il a pu porter plus d’une centaine de noms TokitarĂŽ Ă  3 ans, TetsuzĂŽ Ă  9, Tatsumasa, Katsushika, et ainsi de suite jusqu’à l’un des derniers, et sĂ»rement son favori, GakyĂŽjin Hokusai, le fou de dessin ». Presque un nom par annĂ©e de vie, avancent certains historiens, d’une vie qui avoisine 90 ans et a produit pas loin de trente mille dessins, dont l’attribution, on l’imagine, n’est pas toujours aisĂ©e
 ShunrĂŽ, l’éclat du printemps » 1778-1794 La profusion, la vitalitĂ©, l’inventivitĂ© sont indissociables de la vie de Hokusai qui Ă©prouvait le besoin d’abandonner son nom ancien lorsqu’il changeait de genre, comme on se dĂ©pouille d’un manteau usagĂ©, passant de l’estampe de théùtre aux livres illustrĂ©s, puis aux gravures de voeux, aux paysages ou aux manuels techniques, les extraordinaires Manga. Quelques-uns d’entre eux, cependant, correspondent Ă  six Ă©tapes importantes de sa carriĂšre. Son premier nom d’artiste, ShunrĂŽ, l’éclat du printemps », il l’a reçu de son maĂźtre Katsukawa ShunshĂŽ 1726-1792, dans l’atelier duquel il est entrĂ© en 1778. Cet apprenti de 18 ans est probablement nĂ© le 31 octobre 1760, annĂ©e du Dragon, dans le quartier de HonjĂŽ, Ă  l’est d’Edo, l’ancien nom de Tokyo. Le district est aussi connu sous le nom de Katsushika, qui lui servira plus tard de patronyme. On ne sait rien de sa famille, si ce n’est qu’il a certainement Ă©tĂ© adoptĂ© par un miroitier au service du shĂŽgun, vers l’ñge de 3 ou 4 ans. Est-ce d’avoir Ă©tĂ© Ă©levĂ© dans une famille d’artisans qui façonne sa sensibilitĂ© artistique? Hokusai n’a pas Ă©crit de mĂ©moires, pourtant, Ă  l’occasion de deux textes accompagnant ses Ɠuvres, il note que sa passion sincĂšre pour l’art » s’est dĂ©veloppĂ©e dĂšs l’ñge de 6 ans. Hokusai, Le Pavillon du turbo cornu, sĂ©rie Sites Ă  la mode dans les quatre directions de la capitale de l’Est, vers 1785-1787, estampe nishiki-e, format chĂ»ban, 19 x 25,5 cm, signature ShunrĂŽ ga » À 13 ans, il est apprenti chez un xylographe, et, peut-ĂȘtre en mĂȘme temps, commis chez un libraire, deux formations qui sont Ă  la racine de son amour de la gravure et de la littĂ©rature classique. Katsukawa ShunshĂŽ est un des maĂźtres reconnu de l’art de l’estampe, rĂ©putĂ© pour ses portraits d’acteurs du kabuki et de belles femmes, les bijin. Le premier, il a su se dĂ©marquer des stĂ©rĂ©otypes de ce genre d’images et rendre Ă  ses modĂšles la particularitĂ© de leurs expressions physiques. Ce style expressif, qui lui vaut un grand succĂšs, va imprĂ©gner le futur Hokusai. En cette fin du XVIIIe siĂšcle, l’estampe, dĂ©sormais entiĂšrement polychrome, nishiki-e, est devenue un art qui suscite un engouement extraordinaire dans toutes les classes sociales d’une sociĂ©tĂ© prospĂšre. AppelĂ©e ukiyo-e, image du monde flottant », elle cristallise, par son style vif et raffinĂ©, l’esprit de ce monde de divertissement et de pur plaisir qu’on trouve dans les théùtres et les jardins d’Edo, la nouvelle capitale, et prĂšs des maisons vertes » de Yoshiwara, le quartier des courtisanes. Hokusai, L’Acteur Ôtani Hiroji dans le rĂŽle du lutteur de sumĂŽ Nuregami no ChĂŽgorĂŽ, 1789, estampe nishiki-e, format hosoban, 28 x 13cm Romans populaires et cartes de voeux Vivre seulement pour l’instant, contempler la lune, la neige, les cerisiers en fleur et les feuilles d’automne, aimer le vin, les femmes et les chansons, se laisser porter par le courant de la vie
 », Ă©crit le romancier Asai RyĂŽi, en 1661. Le jeune ShunrĂŽ dĂ©bute modestement dans ce monde brillant des estampes commerciales d’acteurs en bichromie, des illustrations de romans populaires, ces livres Ă  couverture jaune » ou kibyĂŽshi, des cartes de voeux, qu’on appelle surimono. Quelques indices, cependant, permettent de penser que ShunrĂŽ a dĂ©jĂ  Ă©tĂ© remarquĂ© un Ă©diteur, Tsutaya, lui commande spĂ©cifiquement, en 1790, des estampes d’acteurs et des illustrations de programmes de théùtre
 SĂŽri et la nouvelle vision de la peinture 1794-1805 Le maĂźtre SunshĂŽ meurt en 1793 et ShunrĂŽ quitte son atelier cette annĂ©e- lĂ , sans que l’on sache s’il a Ă©tĂ© congĂ©diĂ© ou s’il est parti de son plein grĂ©, aprĂšs une querelle que la rumeur attribue Ă  son caractĂšre ombrageux et fonciĂšrement indĂ©pendant. Reste que, trĂšs curieux des nouvelles techniques et modes d’expression – un trait de personnalitĂ© qui mĂ©rite d’ĂȘtre soulignĂ© dans un Japon totalement fermĂ© Ă  tout apport Ă©tranger depuis 1638 –, il s’est dĂ©jĂ  intĂ©ressĂ© Ă  la perspective occidentale telle que l’utilisent les estampes de Toyoharu 1735-1814. Il est possible aussi qu’il ait suivi l’enseignement de Shiba KĂŽkan 1747-1818, peintre familier des Hollandais autorisĂ©s Ă  accoster Ă  Nagasaki. Entre 1793 et 1795, l’artiste doit faire face Ă  de grandes difficultĂ©s, tant sur le plan personnel – sa femme meurt, le laissant seul avec trois enfants en bas Ăąge – que professionnel, produisant peu d’oeuvres signĂ©es Kusamura ShunrĂŽ. Hokusai, Jolie femme attendant une visite, vers 1797-1804, kakemono, rouleau de papier, 38,6 x 48,6 cm, signature Hokusai ga» Mais, en 1795, Hokusai se voit proposer de prendre la direction de l’atelier de peinture de Tawaraya SĂŽri actif entre 1760 et 1780. Il adopte le nom de SĂŽri II en hommage au maĂźtre. Pour brĂšve qu’elle soit, la pĂ©riode qui s’engage alors porte en germe l’évolution Ă  venir de l’artiste. Il se dĂ©tourne du monde de l’ukiyo-e, bien dĂ©cidĂ© Ă  prouver qu’il peut dĂ©velopper une carriĂšre de vrai » peintre. Peut-ĂȘtre profite-t-il Ă  ce moment-lĂ  des enseignements du style KanĂŽ, Ă©cole de peinture officielle du shĂŽgun, inspirĂ©e de l’esthĂ©tique chinoise. Quoi qu’il en soit, Hokusai SĂŽri est Ă  la recherche d’une nouvelle vision de la peinture. Il se rapproche des cercles littĂ©raires de son temps, il compose des poĂšmes, Ă©crit des rĂ©cits et s’intĂ©resse Ă  l’édition d’estampes non commerciales. Apparaissent en effet, dans les annĂ©es 1790, les kyĂŽka surimono, poĂšmes accompagnĂ©s d’illustrations. Hokusai, Sifflet de la cerise d’hiver, sĂ©rie Sept Manies des jeunes femmes sans Ă©lĂ©gance, 1801-1804, estampe nishiki-e, format ĂŽban, 38,2 x 25,8 cm Hokusai, dont la notoriĂ©tĂ© s’étend, propose aux sociĂ©tĂ©s de poĂštes, tel le cercle Asakusa, d’inverser le procĂ©dĂ© il fournit des sĂ©ries d’estampes sur lesquelles on composera kyĂŽka ou haiku. Il en dessinera trente-deux entre 1799 et 1809. Perspective occidentale Le style SĂŽri s’affirme dans sa pleine singularitĂ©. Ses personnages, femmes Ă  la toilette, courtisanes en promenade, paysans ou artisans vaquant Ă  leurs occupations, semblent mus par une sorte de mĂ©lancolie indolente, une tristesse diffuse qui les rend immatĂ©riels. Les belles dĂ©licates Ă©tirent leur frĂȘle silhouette avec raffinement, et leurs visages allongĂ©s ont dĂ©jĂ  la forme de pĂ©pin de melon », si caractĂ©ristique de ses oeuvres ultĂ©rieures. Dans la mĂȘme pĂ©riode, il poursuit ses recherches sur la perspective occidentale qu’il met en application dans la sĂ©rie ChĂ»shingura. Nouvelles Estampes en perspective, sur le thĂšme trĂšs cĂ©lĂšbre de La Vengeance des 47 rĂŽnin la ligne de fuite mais aussi les nuages sur le mont Fuji sont un emprunt Ă  l’art occidental. Enfin, on voit naĂźtre son style si particulier de paysage et ses thĂšmes de prĂ©dilection le mont Fuji, les plantes, les vagues. Les personnages, toutefois, n’y sont pas encore intĂ©grĂ©s, comme ils le seront dans les chefs-d’oeuvre des annĂ©es 1830. Mais le siĂšcle qui se termine a vu l’apparition d’un artiste douĂ© d’un style graphique qu’on ne peut confondre avec aucun autre. Le peintre Hokusai est nĂ©. Hokusai, atelier de l’étoile polaire » 1805-1810 À partir de 1800, SĂŽri signe dĂ©sormais Hokusai, qui signifie atelier de l’étoile polaire », un signe probable que le peintre aurait ralliĂ© la secte bouddhique de Nichiren, spĂ©cifiquement attirĂ©e par le culte du bodhisattva MyĂŽken, incarnation de l’étoile polaire. Depuis quelques annĂ©es dĂ©jĂ , l’artiste a choisi cet astre comme son symbole, et le montrera dĂ©sormais Ă  de nombreuses occasions tout au long de sa vie. À l’intĂ©rieur mĂȘme de cette pĂ©riode, ses signatures vont nĂ©anmoins varier il est, entre autres, Katsushika Hokusai pour les romans ou les estampes populaires, Hokusai Tatsumasa ou GakyĂŽjin Hokusai, fou de peinture », pour les kyĂŽka surimono, et on peut affirmer que ce changement selon les genres est important pour lui, un peu, souligne l’historien Matthi Forrer, comme s’il appliquait un nom de marque Ă  ses Ɠuvres. Hokusai, Enfants Ă  leurs jeux, entre 1804 et 1813, surimono, 38,4 x 53,2 cm, signature Katsushika Hokusai ga », Tsuwano, Katsushika Hokusai Museum of Art. 1798 constitue un tournant dans sa carriĂšre. Hokusai quitte l’atelier Tawaraya et fonde sa propre Ă©cole. Sa notoriĂ©tĂ© est dĂ©jĂ  grande et il apparaĂźt comme le principal dessinateur de kyĂŽkabon et kyĂŽka surimono. Peu Ă  peu cependant, sans abandonner complĂštement ce domaine des estampes non commerciales ses Ă©lĂšves ont aussi repris le flambeau de cette activitĂ©, il renoue brillamment avec les gravures bon marchĂ© et les livres populaires plus de mille illustrations, entre 1804 et 1815, pour ces derniers, soit Ă  peu prĂšs deux cent trente-cinq volumes ! En 1805, il travaille avec le grand Ă©crivain Kyotukei Bakin 1767-1848 Ă  une Ă©dition japonaise du grand classique chinois Contes au bord de l’eau, un projet qui fera date. Est-ce parce qu’il y rĂšgne une plus grande libertĂ© Ă  la fois de sujets et de format et que son inventivitĂ© passionnĂ©e peut se dĂ©ployer sur ce terrain ? Hokusai, Album de peintures, 1808-1809, un volume sur papier, signature Hokusai », Londres, Victoria and Albert Museum. Dans une premiĂšre pĂ©riode, de 1798 Ă  1804, Hokusai continue Ă  exploiter le style des annĂ©es Tawaraya personnages fĂ©minins Ă  l’expression douce et mĂ©lancolique, aux figures souples et allongĂ©es. À partir de 1807, apparaissent les grandes lignes de recherche qu’il dĂ©veloppera par la suite. Les expressions des visages, leurs Ă©motions affleurent sous son pinceau et trouvent un Ă©cho dans le rendu des paysages, aussi dĂ©licats et Ă©thĂ©rĂ©s que sont l’ñme et l’esprit de ceux qui les traversent. Par ailleurs, Hokusai s’intĂ©resse de plus en plus Ă  la perspective occidentale, qu’il avait dĂ©jĂ  mise en oeuvre dans une sĂ©rie des Vues des lieux cĂ©lĂšbres d’Edo, en 1799. En 1805, avec une Vue de la plage de Noboto Ă  marĂ©e basse depuis la cĂŽte de GyĂŽtoku, il persĂ©vĂšre dans cette direction et introduit mĂȘme dans une autre estampe la notion de clair-obscur, en utilisant une ombre par-dessus les couleurs c’est la premiĂšre apparition de ce genre dans l’estampe japonaise. ExcentricitĂ©s artistiques Cette pĂ©riode est aussi celle oĂč ses excentricitĂ©s artistiques, qui deviendront cĂ©lĂšbres, se manifestent. En 1805, sa renommĂ©e de peintre Ă©gale celle de graveur. Il se lance, au temple Gokoku, proche d’Edo, dans un vĂ©ritable happening » public un portrait de cent vingt tatami 21, 6 mĂštres sur 9 de Daruma, le fondateur du bouddhisme zen. Hokusai a tapissĂ© une surface de 350 mĂštres carrĂ©s de papier et y a promenĂ© un Ă©norme balai de bambou trempĂ© dans une cuve d’encre. Ce n’est que lorsque le panneau a Ă©tĂ© dressĂ© sur cadre que les spectateurs Ă©bahis ont compris qu’il s’agissait du buste du patriarche porte-bonheur
 Taito, Ă©toile de la Petite Ourse » 1810-1819 En 1810, la cĂ©lĂ©britĂ© de Hokusai est un fait Ă©tabli. Ne raconte-t-on pas que le shĂŽgun Ienari l’a conviĂ©, en 1804, Ă  un concours de peinture oĂč il doit affronter un autre artiste renommĂ©, Tani BunchĂŽ 1763-1840? Loin de se plier aux rĂšgles de la compĂ©tition, Hokusai a fait dĂ©monter une porte coulissante qu’il a balayĂ©e d’encre bleue, en lignes sinueuses. Puis il a fait venir un coq qu’il a incitĂ© Ă  se promener sur la surface, aprĂšs lui avoir trempĂ© les pattes dans de la peinture rouge. Une fois le panneau remis en place, toute l’assemblĂ©e a reconnu la riviĂšre Tatsuta, chargĂ©e de feuilles d’érables Ă  l’automne
 L’anecdote, pour vraie qu’elle soit, est rĂ©vĂ©latrice de la lĂ©gende qui le nimbe. Car on dit aussi que Hokusai peut immortaliser une volĂ©e de moineaux sur un grain de riz ou peindre en utilisant ses doigts, ses ongles ou le manche d’un pinceau, enfin, n’importe quel objet
 Rien ne rĂ©siste Ă  ce fou de peinture ». Hokusai, Sangino Takamura, pĂȘcheuse d’ormeaux, sĂ©rie Cent PoĂšmes de cent poĂštes expliquĂ©s par la vieille nourrice, vers 1835, estampe nishiki-e, format ĂŽban, 25,6 x 36,6 cm, Hokusai a 50 ans, un Ăąge dĂ©jĂ  avancĂ© dans le Japon du XIXe siĂšcle, et songe en consĂ©quence Ă  ce qu’il pourra lĂ©guer de son savoir Ă  la postĂ©ritĂ©. C’est l’époque des manuels qui s’ouvre, Ă©tonnante Ă  nos yeux d’Occidentaux mais non pour l’esprit d’un bouddhiste convaincu qui a connu une illumination l’artiste est investi d’une mission, celle de transmettre son expĂ©rience, ses dĂ©couvertes, les nouvelles voies d’exploration de la peinture. Hokusai adopte alors le nom de Taito, inspirĂ© par Taihokuto, l’ Ă©toile de la Petite Ourse ». Nombreux sont les disciples qui accourent Ă  lui lors d’un voyage Ă  Nagoya, en 1812. Hokusai, Carnet de croquis, 1814, Metropolitan Museum of Art, New York Cet automne, le Vieil Homme a fait par hasard un voyage vers l’ouest et s’est arrĂȘtĂ© dans notre ville, Ă©crit un artiste. Nous nous sommes d’abord rencontrĂ©s chez GekkĂŽtei Bokusen [
] puis il a exĂ©cutĂ© plus de trois cents croquis de toutes sortes. D’immortels, du Bouddha, d’érudits et de femmes, d’oiseaux, de bĂȘtes sauvages, d’herbes et d’arbres, en dessinant aussi le vĂ©ritable esprit de tout cela. » Les Ă©lĂšves vont recopier et mettre en page beaucoup de ces croquis, publiĂ©s par un Ă©diteur en 1814 c’est le premier volume des fameux dessins au fil du pinceau », Hokusai manga, une mĂ©thode qui va connaĂźtre un tel succĂšs qu’on demandera au maĂźtre d’en produire de nouvelles sĂ©ries. La vie quotidienne du Japon Ce sont prĂšs de quatre mille dessins en quinze volumes qui seront rĂ©imprimĂ©s au long du XIXe siĂšcle. Toute la vie quotidienne du Japon s’y trouve, saisie sur le vif avec un humour et une affection palpables les plantes et les animaux, mais aussi les paysages et les artisans, croquĂ©s avec leurs outils, leurs attitudes, les gestes de leur travail. Des Ă©crivains cĂ©lĂšbres prĂ©facent chaque tome, s’émerveillant de ces images indescriptibles et sans Ă©gales, dont la contemplation ne cesse d’inspirer ». D’autres manuels techniques suivront, dont les Ă©tudes amorcent certaines visions des grandes estampes du mont Fuji. Hokusai, Femmes prĂ©parant le thĂ© autour de l’ñtre, 1816, Metropolitan Museum À la mĂȘme Ă©poque, Taito s’attache avec une particuliĂšre virtuositĂ© aux shunga, les peintures de printemps » ou images Ă©rotiques, qui sont le fruit d’une longue tradition de l’art japonais. Il y dĂ©crit les acrobaties sexuelles, et parfois singuliĂšres, souvent malicieuses, de couples oĂč les femmes pulpeuses et Ă©panouies ont remplacĂ© les silhouettes frĂȘles des annĂ©es prĂ©cĂ©dentes. Iitsu, une nouvelle vie 1820-1834 En 1820, Hokusai atteint l’ñge de 60 ans, et son anniversaire conclut un cycle complet du zodiaque, formĂ© de soixante combinaisons possibles. L’importance est extrĂȘme pour tout Japonais, d’autant que l’annĂ©e est, logiquement, Ă  nouveau celle du Dragon. Hokusai change de nom pour prendre, non sans malice, celui d’Iitsu, ĂągĂ© de nouveau de un an ». Une nouvelle vie commence, symboliquement et, Ă©tonnamment mais faut-il vraiment s’en Ă©tonner, parlant de Hokusai, le plus fĂ©cond, le plus incroyablement inventif des artistes de son temps ?, esthĂ©tiquement aussi. C’est de cette pĂ©riode, pourtant trĂšs noire sur le plan personnel sa femme et une de ses filles meurent, une autre divorce, son petit-fils l’accable de ses dettes de jeu que dateront les grandes estampes qui feront de Hokusai le peintre le plus connu de l’art japonais et l’identifieront dĂ©finitivement aux yeux des Occidentaux. Hokusai, Vent du sud, ciel clair Le Fuji rouge, sĂ©rie Trente-Six Vues du mont Fuji, vers 1830-1834, estampe nishiki-e, format ĂŽban, 26,1 x 38,1 cm Nourri d’un enthousiasme renouvelĂ©, Hokusai Iitsu retourne d’abord au monde littĂ©raire. Une commande importante de trente-six surimono carrĂ©s lui est faite, en 1821, annĂ©e du Serpent, sur le thĂšme des coquillages. Hokusai dĂ©ploie toute son ingĂ©niositĂ© et sa libertĂ© de ton pour faire de cette sĂ©rie, Coquillages de l’ùre Genroku, une oeuvre unique dans les annales de la nature morte. Il multiplie les rĂ©fĂ©rences littĂ©raires, historiques, lĂ©gendaires et les jeux de mots pour chaque illustration de mollusque, cernĂ©e d’un cartouche rouge. L’annĂ©e suivante, annĂ©e du Cheval, il dessine une mĂ©morable suite de chevaux, Umazukushi, d’un raffinement stupĂ©fiant sur l’estampe du Talisman du cheval, le cartouche du titre, en forme de calebasse, est une allusion Ă  celle dans laquelle l’ermite chinois ChĂŽkarĂŽ range son cheval magique. Peut-on imaginer plus grande subtilitĂ© ? Hokusai, Umazukushi Komashobu Le Talisman du Cheval, 1822, 18 x 20cm Le thĂšme du paysage est rĂ©current dans l’oeuvre de Hokusai depuis ses dĂ©buts, par sa prĂ©sence aussi bien dans les estampes commerciales que dans les surimono ou les illustrations de livres. Mais la maniĂšre dont il le traite Ă  partir des annĂ©es 1830 dans trois sĂ©ries d’estampes, Trente-Six Vues du mont Fuji, Voyage au fil des cascades des diffĂ©rentes provinces et Vues extraordinaires des ponts des diverses provinces, constitue une vĂ©ritable rĂ©volution dans le genre, en mĂȘme temps qu’elles rendent soudain les Japonais curieux de leur archipel et de sa nature. Une des consĂ©quences sera la multiplication des pĂšlerinages et des voyages destinĂ©s Ă  admirer la beautĂ© des sites cĂ©lĂšbres. Le bleu de Berlin Jusque-lĂ , dans la peinture aristocratique chinoise ou japonaise, le paysage n’avait servi que de faire-valoir, de dĂ©cor Ă  des scĂšnes ou des portraits. Hokusai, Pont de bateaux de Funa dans la province de KĂŽzuke vue ancienne, sĂ©rie Vues extraordinaires des ponts des diverses provinces, vers 1834, estampe nishiki-e, format ĂŽban, 26,4 x 38,4 cm, signature Saki no Hokusai Iitsu hitsu », Tsuwano, Katsushika Hokusai Museum of Art. DĂ©sormais, sujet Ă  part entiĂšre, il acquiert une Ăąme et renvoie son spectateur Ă  sa vision intĂ©rieure. Le mont Fuji n’est Ă©videmment pas un lieu banal. Montagne la plus sacrĂ©e du Japon, incarnation d’Amaterasu, plus grande dĂ©esse du panthĂ©on shintĂŽ, sa reprĂ©sentation est dĂ©jĂ  prĂ©sente chez Hokusai en 1790, telle un phare qui aimanterait ses pensĂ©es. L’investissement spirituel n’a d’égale que l’extrĂȘme modernitĂ© du traitement choix d’un grand format, prĂ©cision topographique, description mĂ©ticuleuse et pleine d’humour des activitĂ©s humaines, audace des cadrages et des signes graphiques
 MĂȘme la couleur est une nouveautĂ©, la belle polychromie ayant Ă©tĂ© prĂ©cĂ©dĂ©e d’une sĂ©rie imprimĂ©e en aizuri-e, grĂące au Berorin ai, le bleu de Berlin ou de Prusse, fraĂźchement dĂ©barquĂ©, qui est un pigment stable, contrairement Ă  l’indigo japonais. Le succĂšs fut tel que l’éditeur commanda Ă  Hokusai dix estampes supplĂ©mentaires, portant le nombre des vues du mont Fuji Ă  quarante-six. GakyĂŽ RĂŽjin Manji, le vieil homme fou de dessin 1834-1849 Que peut-on encore espĂ©rer lorsqu’on atteint 75 ans, Ăąge considĂ©rable dans le Japon du XIXe siĂšcle, et qu’on a Ă©tĂ© reconnu comme le plus grand artiste de son Ă©poque? La perfection de son art, et rien d’autre. C’est Ă  la poursuite de celle-ci que Hokusai s’attache les quinze derniĂšres annĂ©es de sa vie. Et c’est bien le moins que, pour cheminer avec une telle ambition, il choisisse derechef un nouveau nom. Ce sera Manji, dix mille ans », prĂ©cĂ©dĂ© de GakyĂŽ RĂŽjin, littĂ©ralement le Vieil Homme fou de dessin ». De 1830 Ă  1834, Hokusai a non seulement produit des paysages exceptionnels mais aussi des estampes extraordinaires sur les fleurs et les animaux. Ce sont ces Carpes sous une cascade, Tortues nageant ou Iris et Sauterelle, qui, parvenant en Europe, auront une grande influence sur les impressionnistes et les crĂ©ateurs de l’Art nouveau. Deux carpes sous une cascade, 1831, estampe nishiki-e, format uchiwa-e, 23,2 x 28,7 cm, signature Hokusai Aratame Iitsu hitsu », Cleveland Museum of Art Ce n’est certainement pas la premiĂšre fois que l’art de Hokusai atteint l’Europe. MĂȘme, en 1826, un Ă©pisode singulier a eu lieu. Une dĂ©lĂ©gation du comptoir colonial hollandais de Deshima, cette enclave autorisĂ©e aux Ă©trangers, se rend Ă  Edo et, aprĂšs avoir rencontrĂ© le shĂŽgun, trois de ses membres demandent Ă  connaĂźtre Hokusai. S’ensuivra un Ă©change surprenant Hokusai recevra du papier et des aquarelles hollandaises et rĂ©pondra Ă  la commande de plusieurs peintures, peut-ĂȘtre une quarantaine, de scĂšnes de la vie japonaise et des vues d’Edo. Certaines se trouvent aujourd’hui au musĂ©e d’Ethnologie de Leyde, aux Pays-Bas. Hokusai, Dragon dans les nuĂ©es, 1849, kakemono, shihon, encre de Chine et lavis bleu outremer sur papier, 102,5 x 42,5 cm, signature KyĂ»jĂ» RĂŽjin Manji hitsu » Un univers fantastique Si Hokusai reste dans ses derniĂšres annĂ©es un immense graveur, il accorde une place prĂ©pondĂ©rante Ă  la peinture. La crise Ă©conomique de la fin des annĂ©es 1830 le rĂ©duit Ă  la misĂšre et le force, pour survivre, Ă  vendre ses dessins dans la rue. Comble de malheur, un incendie dĂ©truit son atelier et la plupart de ses Ɠuvres, en 1839. On dit que, rĂ©veillĂ© en pleine nuit, l’artiste de 80 ans n’emporta rien d’autre que ses pinceaux, tĂ©moignant par lĂ  de sa foi en l’avenir. Une confiance qu’il entretient, en dessinant, chaque jour, entre 1842 et 1844, un lion chinois ou shishi, animal de lĂ©gende porte-bonheur. L’animal est plus qu’un exorcisme contre la maladie et la mort c’est un exercice de dessin Ă©poustouflant, tantĂŽt aimable, tantĂŽt grotesque, accusant de grandes ressemblances avec les personnages qui ont toujours occupĂ© le monde de Hokusai, courtisanes, pĂȘcheurs, artisans ou samouraĂŻs
 Hokusai, Spectre d’Oiwa-san, sĂ©rie Cent Histoires de fantĂŽmes, vers 1831-1832, estampe nishiki-e, format chĂ»ban, 24,8 x 18,2 cm, signature Saki no Hokusai hitsu », Tsuwano, Katsushika Hokusai Museum of Art Il est aussi, par son caractĂšre anthropomorphique, une porte d’entrĂ©e dans le dernier monde esthĂ©tique du peintre. Un univers Ă  la limite du fantastique, de l’animiste et du mystĂ©rieux, oĂč les dragons sourcilleux sont aussi rĂ©els que les tigres ondoyants. C’est toute la nature, des cascades aux chrysanthĂšmes, qui prend une allure surnaturelle les fantĂŽmes et autres monstres ne sont jamais loin. Fouler les champs d’étĂ© Hokusai s’éteignit le 18e jour du 4e mois de 1849. Avant son dernier soupir, il avait composĂ© un dernier haiku Tel un fantĂŽme, je foulerai d’un pas lĂ©ger les champs d’étĂ©. » Son testament, nĂ©anmoins, il l’avait Ă©crit dix ans auparavant, dans une postface aux Trente-Six Vues du mont Fuji Depuis l’ñge de 6 ans, j’avais la manie de dessiner la forme des objets. Vers l’ñge de 50 ans, j’avais publiĂ© une infinitĂ© de dessins, mais tout ce que j’ai produit avant l’ñge de 70 ans ne vaut pas la peine d’ĂȘtre comptĂ©. C’est Ă  l’ñge de 73 ans que j’ai compris Ă  peu prĂšs la structure de la nature vraie, des animaux, des herbes, des arbres, des oiseaux, des poissons et des insectes. Par consĂ©quent, Ă  l’ñge de 80 ans, j’aurai encore fait plus de progrĂšs. À 90 ans, je pĂ©nĂ©trerai le mystĂšre des choses ; Ă  100 ans je serai dĂ©cidĂ©ment parvenu Ă  un degrĂ© de merveille, et quand j’aurai 110 ans, chez moi, soit un point, soit une ligne, tout sera vivant. Je demande Ă  ceux qui vivront autant que moi de voir si je tiens parole.»

la grande ambition des femmes est d inspirer l amour